AHMED BEN DHIAB A.B.D. PRODUCTION

BEN DHIAB AHMED

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LE SOUFFLE ET LE GESTE CHEZ AHMED BEN DHIAB: 

MÉDITATION ET ONIRISME


Il faut s’aventurer sur la voie ouverte par Ahmed Ben Dhiab en prenant en compte toutes les facettes de son travail, de sa recherche, pour mesurer l’interdépendance des expressions de son imaginaire, de sa pensée. 

Comme le souffle qui emporte le derviche tourneur dans un élan irrépressible, la voix profonde, reconnaissable d’Ahmed engendre des vibrations en lien avec la main qui va écrire, peindre, dessiner. L’artiste est un, en même temps s’incarne dans des figures appartenant au mode musical, pictural, littéraire. Le Chaman utilise les matériaux que la nature lui offre, pour permettre à son interlocuteur de pénétrer dans l’au-delà des apparences, Ahmed charge les différents médiums qu’il utilise d’une force mentale liée au corps, propre à engendrer des formes qui se complètent, entrent en résonance. Son appartenance première à une source qu’il désigne et vit comme sacrée, celle du soufisme, détermine sa marche solitaire.

Il marche, en inspiré, guidé par la voix intérieure d’un chant qui l’habite et qu’il restitue dans une œuvre contemporaine aux références culturelles archaïques et néanmoins vivantes. Le Samaa transmet à travers les modulations de la voix son aspiration spirituelle, autant qu’il guide sa main vers les écritures qu’il réinterprète, les couleurs qu’il conjugue. Quelle que soit sa source, quand il prend le pinceau ou la plume, on ne peut oublier le calame du calligraphe, ses encres, le noir et le blanc surtout, avant les acryliques qui ouvrent d’autres champs. La calligraphie et l’univers des signes, avant l’écriture. Les signes premiers qu’il réemploie. 

Il balaie tout le champ de la recherche humaine depuis les peintures rupestres, non pas scientifiquement, avec application, mais dans le désordre de la mémoire dont il sait faire émerger ce qui correspond à son désir du moment, se référant aux idéogrammes ou aux pictogrammes des écritures les plus anciennes. Il invente à son tour son vocabulaire plastique, son cosmos, ses mers et ses sirènes, ne gardant que les astres préférés du poète, la lune et le soleil. Il privilégie les divisions en figures géométriques, rectangles et carrés, allusion aux tablettes de terre, à l’apparence magique, aux quadrillages des jeux de dames auxquels s’exercent toujours les vieux yéménites assis sur le sable damé des rues de Shibam. Ahmed Ben Dhiab circule à travers les signes intemporels, les symboles majeurs toujours à réinventer, s’approprier, transformer. L’artiste contemporain, ne sort pas du rien, il naît avec sa mythologie, sa mémoire, fait son apprentissage et peu à peu dévoile en se dévoilant à lui-même, une part du secret de l’existence présente et à venir. Plus que quiconque Ahmed navigue entre ce qui est su et ce qui est à apprendre. Le dévoilement ne se fait jamais sans douleur ni le retour sur le passé. 

Bagdad, une ville au cœur. Bagdad chantée par Ahmed Ben Dhiab à travers la poésie, le trait, la couleur, le chant, toujours par les chemins de l’art, en rejoignant les voix de Rûmi qu’il cite dans la page d’introduction de son ouvrage de poésie «Fulgurances». La voix de Farid Al-Din-Attar dont les oiseaux traversent parfois la toile. Poésie de l’amour divin illuminant tout amour. Comme ses illustres prédécesseurs en poésie mystique il nomme les figures du monde naturel, ce qui donne à sa poésie une consistance charnelle. Le vent, les arbres, le sang, le blé, le soleil habitent son cœur et son corps, il le dit, l’écrit, les dessine, les inscrit comme autant de repères visuels sur les toiles. Habité par une histoire ancienne il n’en est pas moins attentif aux événements souvent dramatiques du monde contemporain. Ainsi, la Palestine et l’Irak projettent-ils l’ombre de leurs guerres sur la lumière des mots et des couleurs. Passé/présent de la réalité historique, passé/présent de la poésie universelle, Ahmed convie à tour de rôle Khalil Jibran, René Char et Rûmi.

La liberté avec laquelle il organise la surface des toiles ou de la feuille de papier nous conforte dans l’analyse de sa posture d’artiste aux prise avec les problèmes de tout créateur du XXIème siècle qui, ayant recueilli un vieil héritage ne se laisse pas enfermer dans ses codes. La calligraphie, par exemple, comme les décors de mosaïque qui ornent les architectures des édifices arabo musulmans sont réinventés. Ahmed Ben Dhiab compose ses tableaux en utilisant parfois la même géométrie des décors ornant les monuments de l’architecture religieuse islamique, surfaces compartimentées, divisées, répétition des motifs, mais palmes et feuilles, côtoient un bestiaire et une humanité qui lui sont propres. L’écriture devient signe, trace, élément esthétique tout en gardant sa référence sacrée puisque la beauté est fondamentalement liée à l’expression du divin. 

L’artiste met la même passion à chanter qu’à dessiner ou peindre, attentif aux mouvements du sang dans les veines, au souffle de l’âme qui s’exprime dans la respiration. Dans ses «paysages» écrits et colorés on sent la rage de transcrire les émotions contradictoires nées de la vie dans son parcours accidenté, poétique, à la fois trivial et fulgurant. Plusieurs portraits d’hommes pourraient être des autoportraits. On y sent la solitude, la fragilité de l’artiste possédé par son désir de franchir les limites du monde matériel pour accéder à l’autre versant, celui de la lumière. Tel ce petit personnage rêvant sous un croissant de lune dans la nuit vibrant de lueurs rouges et mauves. Sait-il qu’au-dessus de lui les anges ont tissé une tenture d’apparat dont le damier coloré s’inscrit dans le ciel ? On ressent la tendresse et aussi la dérision de l’artiste vis-à-vis de lui-même et des hommes armés seulement de candeur et d’amour. Pas une once d’auto satisfaction dans son regard toujours distancié. On le retrouve sur une autre peinture, au milieu de triangles et de carrés, danseur immobile, dans une déclinaison du bleu. Il est aussi «Le Calligraphe», exposé, tel un Christ profane, bras en croix sur l’horizon rouge, bleu nuit et bleu pâle, recouvert d’inscriptions comme autant de tatouages, le visage barré d’une calligraphie noire. Sur l’un de ses bras tendus, une frise de losanges colorés comme une broderie ou un motif de mosaïques, enrichit la composition  lumineuse. 

La femme règne dans l’œuvre de Ben Dhiab, ici, en créature éthérée, personnage dansant dans une lumière blanche entourée de signes, de traces, de taches colorées. Un arbrisseau habite l’espace et côtoie un astre pâle. Là, réduite à un signe bleu isolé dans un espace blanc constitué de matière épaisse gravée d’empreintes. Un visage hante les peintures, presque le même, si semblable à l’astre nocturne, parfois isolé dans l’espace. L’expression est grave, tendre aussi. C’est celui de la femme-mère célébrée dans la poésie, inscrite comme «Eve», la première. l’Insoumise, écrit-il dans un poème. Symbole de l’amour fondateur de la quête. Amour-Soleil, Shems, l’un des noms de Dieu, nom du compagnon de Rûmi, Shems de Tabriz. 

Le chat, ami du cœur amoureux du poète-musicien est aussi l’animal préféré des femmes de l’artiste. Ainsi dans une irruption de couleurs il célèbre une jeune femme et son chat habillé d’un manteau d’arlequin, se détachant sur un fond d’un bleu intense. Là aussi des éléments végétaux cohabitent avec les personnages, réminiscences d’enluminures dont les origines se perdent dans la nuit des temps. Rappelons les illustrations des fables du brahmane indien Bidpaï, écrites en sanscrit, et ses illustrations où les hommes, la nature, les animaux sont omniprésents. Et la tradition n’a cessé de s’enrichir et de se transformer.

Fugitivement l’on a envie d’évoquer tantôt Chagall, tantôt Kandinsky, l’un pour la tendresse qui émane des situations parfois cocasses, qui sont mises en espace, l’autre pour le choix de la palette colorée, l’organisation des formes géométriques. Mais sans jamais penser réduire l’artiste à l’état d’épigone. Il est lui-même, avec sa généalogie singulière. D’ailleurs à peine avions-nous évoqué quelque «maître» qu’aussitôt Ahmed Ben Dhiab nous contredit il en nous confrontant à des œuvres complètement étrangères à ce monde entrevu : tablettes quadrillées habitées de successions de petits tableaux-talismans où écritures et animaux mythiques se répondent. Il est bien l’inventeur d’alphabets du vivant, formule que l’on découvre dans l’un des poèmes de «Fulgurances».

Sur les toiles ou autres supports, Ahmed Ben Dhiab restitue les phases et les déclinaisons de ses émotions utilisant le vocabulaire de ses alphabets d’une richesse inépuisable car ils remontent de sources originelles puissantes avec lesquelles il est en harmonie intérieure totale. On entre dans un espace où l’on baigne dans un champ ésotérique maîtrisé par la rigueur de l’artiste qui dirige la mise en place des figures de son théâtre. Nul besoin d’interpréter le langage des signes et des couleurs, même si le décodage apporte certes un surcroît de sens, car la mise en scène architecture des paysages mentaux que chaque spectateur-lecteur peut interpréter, faire sien. Le monde d’Ahmed Ben Dhiab abonde en références universelles qu’il suffit de se réapproprier sans tenir compte de la distance historique ou géographique qui nous en sépare. Il nous montre un monde humain où la part onirique de chacun est sollicitée, l’étincelle de l’esprit avivé, la couleur du réel rendue à la liberté de la vision individuelle. Autant de partitions originales pour la célébration de la lumière et de la nuit de l’âme.


Nicole de Pontcharra 

Puygiron novembre 2011





THE DIVINE BREATH AND THE ELAN

IN AHMED BEN DHIAB’S WORK: 

MEDITATION AND ONIRISM


When travelling down the road forged by Ahmed Ben Dhiab, one must consider all the facets of his work and research. One must do this to gauge the interdependence of the expressions of his imagination and his thought.

Like the divine breath which carries the whirling dervish to unrestrained fervor, the profound voice, recognizable as Ahmed’s, begets vibrations connected to the hand which writes, paints and draws. The artist is whole, at the same time embodied in figures belonging to musical, pictorial and literary style. The Shaman employs materials offered to him by nature, to allow his interlocutor entry into what is beyond appearance. Ahmed charges the different media that he utilizes with a mental force linked to the body, capable of engendering complimentary and resounding forms. His primary affiliation with a source that he designates and experiences as sacred, that of Sufism, determines his solitary journey.

He moves inspired and guided by the interior voice of a song that lives within him and which he recreates in a contemporary work of archaic, nonetheless living cultural references. The Samaa transmits through voice modulations as his spiritual aspiration guides his hands toward the writings to be reinterpreted and the colors to be conjugated. Whatever the source may be, one must not forget the calligraphist’s pencil, its inks -above all the black and white- before the acrylics will open the new vistas. The calligraphy, its inks, above all the black and white, before the acrylics which widen the scope. Calligraphy and the universe of signs precede writing. Primary signs that he reuses.

He sweeps the whole field of human research from the time of the ancient paintings, not scientifically, with care, but in the conflicting flows of memory from which he knows how to make surface that which corresponds to his desire of the moment, reliving the ideograms and pictograms of the most ancient writings. In turn, he invents his plastic vocabulary, his cosmos, his seas and sirens, keeping only the poet’s preferred stars, the moon and the sun. He favors divisions in geometric figures, rectangles and squares, an allusion to earthen tablets, to magical appearance, to the grids of the games of checkers played by old Yemenis on the packed sand of the streets of Shibam. Ahmed Ben Dhiab meanders through timeless messages, the major symbols always to be reinvented, appropriated and metamorphosed. The contemporary artist does not emerge from nothingness, born with his own mythology and his own memory. Like a toddler’s first steps, little by little, he unveils a universe while at the same time he unveils himself: a synthesis of the secret of present and future existence. More than anyone, Ahmed navigates between what is learned and what is to be understood. The unveiling is never painless; the return to the past is equally painful.

Baghdad is deeply seated in the heart; Baghdad, chanted by Ahmed Ben Dhiab through poetry, a stroke of the pen, color, sound. It is always by way of art, merging the voices of Rumi, with which he opens his poetry work, “Fulgurances” (Flashes). The voice of Farid Al-Din-Attar on whose canvas is sometimes crossed by birds. Poetry of divine love, illuminating all love. Like his illustrious predecessors in mystic poetry, he names figures of the natural world, which gives his poetry a carnal consistency. Wind, trees, blood, wheat and the sun incarnate his heart and his body. He tells it, writes it, draws it and inscribes it like so many visual marks on the canvases.

Inhabited by anancient history, he is not less mindful of the often tragic events of the today’s world. Thus, Palestine and Iraq project the shadow of their wars on the light of words and colors. The past and the present of historical reality, the past and present of universal poetry, Ahmed invites successively Khalil Jibran, René Char and Rumi.

The liberty, with which he organizes the surface of the canvases or the sheets of paper, comforts us in the analysis of his position as an artist. He deals with the problems faced by any creative thinker of the 21st century, having collected an old legacy without becoming imprisoned by his codes. For example, calligraphy, like the decorative mosaics which adorn the architecture of Muslim-Arab buildings is reinvented. Ahmed Ben Dhiab creates his paintings by sometimes using the same geometry of decoration adorning the monuments of Islamic religious architecture. These are compartmentalized and divided surfaces and repetitive motifs. However palms and leaves coexist with a bestiary and a humanity that are his own. The writing becomes a sign, a trace, an esthetic element, never ceasing to maintain its umbilical link to the sacred, since beauty is fundamentally an integral expression of the divine.

The artist puts the same passion into singing as drawing or painting, attentive to the movement of the blood through the veins, attentive to the throbbing of the soul, expressing itself through breathing. Within his colored and written “landscapes” one can sense the passion to transcribe conflicting emotions, born of life in its accidental poetic journey, at times both trivial and dazzling. Many man-made portraits could be self-portraits. Within them, one feels the solitude and fragility of the artist; the artist is possessed by his desire to cross the limits of the material world in order to gain access to the other side, that of light. Such a character dreams under a crescent moon in a vibrant night of red and violent glowing. Does he know that above him the angels have woven a ceremonial curtain of which the colored checkerboard is incorporated in the sky? One becomes aware of both the tenderness and derision of the artist vis-à-vis himself and men, armed only with candor and love. Not even an ounce of self-satisfaction in his always distant look. One finds it in another painting; it is in the middle of triangles and squares, immobile dancer, in a declension of blue. It is additionally “The Calligraphy”, exposed, that of a profane Christ, arms crossed on the red, midnight and pale blue horizon; it is covered with inscriptions like so many tattoos, the face written over with black calligraphy. On one of the extended arms, there is a frieze of colored diamonds, like embroidery or a mosaic motif. This motif enriches the luminous composition.

Woman reigns in the works of Ben Dhiab; in his works she is an ethereal creature, a dancing character in a white light, surrounded by signs, marks and colored patches. A shrub inhabits the space and is mixed with a pale star. Reduced to an isolated blue sign in a white space made of thick substance, etched impressions. A face haunts the paintings; it is almost the same as the nocturnal star, sometimes isolated in space. The expression is both serious and tender. It is that of the woman-mother, celebrated in poetry inscribed as “Eve”, the original, the non-subdued. He writes in a poem that she is the symbol of love and the founder of the quest. Love-Sun, Shems, one of the names of God, name of Rumi’s companion, Shems of Tabriz.

The cat, friend of the amorous heart of the poet-musician is the favorite animal of the artist’s women. Thus, in an eruption of colors he celebrates a young woman and her cat, dressed in a harlequin coat, breaking away from a background of intense blue. Here, deciduous elements coexist with characters, recollections of illuminations of which the origins are lost during the night. Let us recall the illustrations of the fables of the famous Indian Brahmin Bidpaï, written in Sanskrit; in his illustrations men, nature and animals are omnipresent. The tradition did not stop growing richer and transforming itself.

Furtively, one is tempted to evoke alternately Chagall and Kandinsky: one for the tenderness emanating from sometimes comical, staged situations; the other for the choice of the colored palate and the organization of the geometric forms. However, this is all completed without reducing the artist to a state of epigone. He is truly himself through his uncommon genealogy. As a matter of fact, no sooner have we evoked some sort of a master, then Ahmed Ben Dhiab contradicts us by works completely exotic to this superficially perceived world. Would appear squared tablets inhabited by successions of picture-talismans or writings and mythical animals mirroring each other. He is surely the inventor of the alphabets of life, a principal which we discover in one of the poems of “Fulgurances” (Flashes). On canvases or other supports, Ahmed Ben Dhiab recreates the phases and the declensions of his emotions using the vocabulary of his alphabets of an inexhaustible richness; these restore the original powerful sources with which he is in total interior harmony. One enters a space where one bathes in an esoteric field mastered by the rigor of the artist who directs the set-up of the figures of his theater. There is no need to interpret the language of signs and colors, even if the decoding would certainly bring about an increase in meaning. This is because the architectural direction of the mental landscapes that each spectator or reader can interpret, is his/her own. The world of Ahmed Ben Dhiab is abundant with universal references that only need to be re-appropriated without taking into consideration the historical or geographical distance separating us from it. He shows us a human world where the dream-like destiny of each person is desired, the spark of the spirit rekindled, and the color of reality is given back to the freedom of individual vision. So many original partitions meant to celebrate light and darkness of the soul.


Nicole de Pontcharra 

Puygiron november 2011

Translated by Wayne Darragh and Hiba Abdelwahab Hechiche





IL SOFFIO E IL GESTO DI AHMED BEN DHIAB: 

MEDITAZIONE E ONIRISMO


Bisogna avventurarsi sulla via aperta da Ahmed Ben Dhiab prendendo in considerazione tutte le sfaccettature del suo lavoro, della sua ricerca, per misurare l’interdipendenza delle espressioni del suo immaginario, del suo pensiero.

Come il soffio che trasporta il derviscio rotante in uno slancio irreprimibile, la voce profonda, riconoscibile di Ahmed genera vibrazioni all’unisono con la mano che scrive, dipinge, disegna. L’artista è uno, nello stesso tempo s’incarna in figure appartenenti al modo musicale, pittorico, letterario. Lo Sciamano utilizza i materiali che la natura gli offre, per permettere al suo interlocutore di penetrare nell’aldilà delle apparenze, Ahmed carica i differenti media, che utilizza, di una forza mentale legata al corpo, atta a generare forme che si completano, entrano in risonanza. La sua appartenenza prima ad una sorgente che egli designa e vive come sacra, quella del sufismo, determina il suo cammino solitario.

Cammina, ispirato, guidato dalla voce interiore d’un canto che lo abita e che restituisce in un opera contemporanea dalle referenze culturali arcaiche e nondimeno viventi. Il Samaa trasmette attraverso le modulazioni della voce la sua aspirazione spirituale, quanto guida la sua mano verso le scritture che reinterpreta, i colori che coniuga. Qualsiasi sia la sua sorgente, quando egli prende il pennello o la penna, non si può dimenticare il calamo del calligrafo, i suoi inchiostri, il nero e il bianco soprattutto, prima degli acrilici che aprono altri campi. La calligrafia e l’universo dei segni, prima della scrittura. I segni primi che riadopera.

Ben Dhiab spazza via tutto il campo della ricerca umana dalle pitture rupestri in poi, non scientificamente, con applicazione, ma nel disordine della memoria da cui sa far emergere ciò che corrisponde al suo desiderio del momento, riferendosi agli ideogrammi o ai pittogrammi delle scritture più antiche. Inventa a sua volta il suo vocabolario plastico, il suo cosmo, i suoi mari e le sue sirene, non serbando che gli astri preferiti del poeta, la luna e il sole. Privilegia le divisioni in figure geometriche, rettangoli e quadrati, allusione alle tavolette di terra, dall’apparenza magica, alle quadrettature dei giochi della dama ai quali si esercitano sempre i vecchi yemeniti seduti sulla sabbia spianata delle vie di Shibam. Ahmed Ben Dhiab circola attraverso i segni atemporali, i simboli maggiori sempre da reinventare, da rendere propri, da trasformare. L’artista contemporaneo, non esce dal nulla, nasce con la sua mitologia, la sua memoria, fa il suo apprendistato e a poco a poco svela, svelandosi a sé stesso, una parte del segreto dell’esistenza presente e a venire. Più che chiunque altro Ahmed naviga tra ciò che è conosciuto e ciò che è da apprendere. Lo svelamento non si fa mai senza dolore né senza il ritorno sul passato.

Bagdad, una città nel cuore. Bagdad cantata da Ahmed Ben Dhiab attraverso la poesia, il tratto, il colore, il canto, sempre per le vie dell’arte, raggiungendo le voci di Rûmi che cita nella pagina d’introduzione della sua opera di poesia «Fulgurances». La voce di Farid Al-Din-Attar i cui uccelli attraversano a volte la tela. Poesia dell’amore divino che illumina ogni amore. Come i suoi illustri predecessori in poesia mistica egli nomina le figure del mondo naturale, il che dà alla sua poesia una consistenza carnale. Il vento, gli alberi, il sangue, il grano, il sole abitano il suo cuore e il suo corpo, lo dice, lo scrive, li disegna, li iscrive come altrettanti reperti visuali sulle tele. Abitato da una storia antica non è meno attento agli avvenimenti sovente drammatici del mondo contemporaneo. Così, la Palestina e l’Irak proiettano l’ombra delle loro guerre sulla luce delle parole e dei colori. Passato/presente della realtà storica, passato/presente della poesia universale, Ahmed invita uno alla volta Khalil Jibran, René Char e Rûmi.

La libertà con la quale organizza la superficie delle tele o del foglio di carta ci conforta nell’analisi della sua postura d’artista alle prese con i problemi di ogni creatore del XXI secolo che, avendo raccolto un’antica eredità, non si lascia chiudere nei suoi codici. La calligrafia, per esempio, come i decori di mosaico che ornano le architetture degli edifici arabo-musulmani sono reinventati. Ahmed Ben Dhiab compone i suoi quadri utilizzando talvolta la stessa geometria dei decori che ornano i monumenti dell’architettura religiosa islamica, superfici suddivise in compartimenti, ripetizione di motivi, ma palme e foglie, rasentano un bestiario e un’umanità che gli sono propri. La scrittura diventa segno, traccia, elemento estetico pur conservando la sua referenza sacra, poiché la bellezza è fondamentalmente legata all’espressione del divino.

L’artista mette la stessa passione nel cantare come nel disegnare o nel dipingere, attento ai movimenti del sangue nelle vene, al soffio dell’anima che si esprime nella respirazione. Nei suoi «paesaggi» scritti e colorati si sente la rabbia di trascrivere le emozioni contraddittorie nate dalla vita nel suo percorso accidentato, poetico, insieme triviale e folgorante. Diversi ritratti di uomini potrebbero essere degli autoritratti. Vi si sente la solitudine, la fragilità dell’artista posseduto dal suo desiderio di superare i limiti del mondo materiale per accedere a un altro versante, quello della luce. Come questo piccolo personaggio sognante sotto una falce di luna nella notte vibrante di bagliori rossi e malva. Sa che al di sopra di lui gli angeli hanno tessuto un paramento di gala la cui scacchiera colorata s’iscrive nel cielo? Si sentono la tenerezza e anche la derisione dell’artista di fronte a sé stesso e agli uomini armati solamente di candore e d’amore. Non un briciolo di autosoddisfazione nel suo sguardo sempre distante. Lo si ritrova in un’altra pittura, in mezzo a triangoli e quadrati, danzatore immobile, in una declinazione di blu. È anche «Il Calligrafo», esposto, come un Cristo profano, braccia in croce sull’orizzonte rosso, blu notte e blu pallido, ricoperto d’iscrizioni come tanti tatuaggi, il volto barrato da una calligrafia nera. Su una delle sue braccia tese, un fregio di losanghe colorate come un ricamo o un motivo di mosaici arricchisce la composizione luminosa.

La donna regna nell’opera di Ben Dhiab, qui, in creatura eterea, personaggio danzante in una luce bianca circondata da segni, da tracce, da macchie colorate. Un arbusto abita lo spazio e costeggia un astro pallido. Là, ridotto a un segno blu isolato in uno spazio bianco costituito di materia spessa incisa d’impronte. Un volto invade le pitture, quasi lo stesso, così simile all’astro notturno, talvolta isolato nello spazio. L’espressione è grave, anche tenera. È quello della donna-madre celebrata nella poesia, iscritta come «Eva», la prima, La non sottomessa, scrive l’artista in una poesia. Simbolo dell’amore fondatore della ricerca. Amore-Sole, Shems, uno dei nomi di Dio, nome del compagno di Rûmi, Shems de Tabriz.

Il gatto, amico del cuore innamorato del poeta-musicista, è anche l’animale preferito dalle donne dell’artista. Così in un’irruzione di colori celebra una giovane donna e il suo gatto vestito con un mantello d’arlecchino, spiccando su un fondo di un blu intenso. Là anche elementi vegetali coabitano con i personaggi, reminescenze di miniature le cui origini si perdono nella notte dei tempi. Ricordiamo le illustrazioni delle favole del brahmano indiano Bidpaï, scritte in sanscrito, dove gli uomini, la natura, gli animali sono onnipresenti. E la tradizione non ha cessato di arricchirsi e di trasformarsi. 

Fuggevolmente si ha voglia di evocare ora Chagall, ora Kandinsky, uno per la tenerezza che emana da situazioni talvolta bizzarre, che sono mises en espace, l’altro per la scelta della tavolozza colorata, l’organizzazione delle forme geometriche. Ma senza mai pensare di ridurre l’artista allo stato di epigono. È sé stesso, con la sua genealogia singolare. D’altronde appena abbiamo evocato qualche «maestro» subito Ahmed Ben Dhiab ci contraddice confrontandoci a opere completamente estranee a questo mondo intravisto: tavolette quadrettate abitate da successioni di piccoli quadri-talismano dove scritture e animali mitici si corrispondono. È proprio l’inventore d’alfabeti del vivente, formula che si scopre in una delle sue poesie di «Fulgurances». Sulle tele o altri supporti, Ahmed Ben Dhiab restituisce le fasi e le declinazioni delle sue emozioni utilizzando il vocabolario dei suoi alfabeti d’una ricchezza inesauribile poiché essi risalgono da sorgenti originali possenti con le quali è in armonia interiore totale. Si entra in uno spazio dove ci si bagna in un campo esoterico dominato dal rigore dell’artista che dirige la collocazione delle figure del suo teatro. Nessun bisogno d’interpretare il linguaggio dei segni e dei colori, anche se la decodificazione apporta certamente un sovrappiù di senso, poiché la regia è archittettura di paesaggi mentali che ogni spettatore-lettore può interpretare, fare suoi. Il mondo di Ahmed Ben Dhiab abbonda di referenze universali di cui basta riappropriarsi senza tener conto della distanza storica o geografica che ci separa da esse. Ci mostra un mondo umano dove la parte onirica di ognuno è sollecitata, la scintilla dello spirito ravvivata, il colore del reale reso alla libertà della visione individuale. Tante partizioni originali per la celebrazione della luce e della notte dell’anima.


Nicole de Pontcharra 

Puygiron novembre 2011

Traduzione dal francese a cura di Francesca Limoli

  
 




 

 



...à propos de la peinture

de Ahmed Ben Dhiab




Les tableaux parlent d’eux-mêmes: ils ont presque toujours pour fond une intense matérialité, quelque chose qui ressemble à un mur sur lequel apparaissent différents signes et symboles, réminiscences culturelles et composantes de la langue plastique de l’artiste. Schémas géométriques, traits d’écriture, notes de musique, ces signes pourraient aussi être des graffitis, voire des figures aériennes, éthérées (et peut-être angéliques), ou encore les notes d’un élève de l’univers consignées sur un cahier mural aux pages infinies. Tout ce mond visuel des tableaux d’Ahmed Ben Dhiab semble résulter de cette action qui consiste à gratter la surface materielle, à en graver le corps mural: ces deux verbes - gratter et graver - sont étymologiquement synonymes d’écrire/graphein. Une écriture, donc, en quête de communication, en quête, aussi, comme un archéologue curieux de son moi culturel, de la mémoire de la matière.


Démosthène Davvetas critique d’art





Les images dAhmed Ben Dhiab sont de lordre du mirage: cest-à-dire quelles jouent sans cesse entre linvisible et le visible à la fois. Il ny a pas de limites précises dans cette narration imagée: car ce sont des espaces illimités et non des lieux précis; nous navons donc pas de repères cartographiques ni historiques pour nous guider. Nous sommes confrontés à un univers de lerrance et du fugitif et lévénement plastique réside dans le fluide et la mouvance. Ces figures éclosent, glissent à la surface et disparaissent. Evanescentes, nous navons que le temps de les apercevoir. Ainsi limaginaire ondoyant, musical et plastique dAhmed Ben Dhiab nest pas un univers vide de formes, ni silencieux. Tout au contraire, son art de la voix et de la ligne mélodique et graphique a pour fonction de nous rendre proches et familiers ces images vocales et figuratives qui sont sans doute, celles de nos frères et sœurs voisins, ceux-là mêmes qui peuplent linvisible.


Francis Bernard peintre  




...Dans ses peintures très pastellisées, riches dune unité sans faille, cest de faire exprimer des désirs, le rêves de lhomme qui sabritent dans le jardin du monde oriental; là où les objet les plus communs, les êtres de légende prennent des formes, qui nous apaisent, et nous interrogent à la fois.
Par ses poèmes, vous comprendrez mieux son univers. Il dit: « Ma sœur pleure le soleil de faim » ou encore « Le nomade choisit toujours la nuit pour sa noce détoiles ». Permettez-moi un dernière citation: « Le poète, au cœur multiple fleurit tous les jardins de mythes étranges ».
Des toiles avec une recherche minutieuse, un intimisme profond, un raffinement dexécution digne des plus grandes époques Arabes.


Journal La Marseillaise




Lécriture prend voix, ou visage à son gré. Sous la main dAhmed Ben Dhiab, le point, la ligne, la lettre rebelle, sassouplie, pour retrouver à travers le geste daujourdhui le mouvement de la mémoire qui lunit aux sources de lillustration Arabo-Musulmane...
Cette source reste souvent énigmatique, aux yeux des occidentaux: que sait-on ici, du rayonnement des écoles d
enluminures et des miniatures de Perse? Inde, Turquie? de lère des Abbassides, des Timourides, qui vit fleurir au XII et XVI ème siècles les foyers dart de Hérat, et de Tabriz où furent illustrés les recueils de poème et les chroniques qui aujourdhui font lorgueil de certaines bibliothèques; ou certaines musées...
ainsi Kalila et Dimna de Bipai (Syrie), Maquâmâts de Al Harîrî (Irak)
lordre du monde et ses merveilles du Cheik Ahmed Misri...
Mais, la main de Ahmed Ben Dhiab, en action, remodèle à linstant une vision nouvelle, un graphisme inventé, où les dessins racontent des histoires, où lécriture dessine des arabesques, où les mots-poèmes sont le silence de limage et source dautres visions.


J. B.




(...) L'occhio che guarda si riempie dei suoi occhi, la testa che scruta dei suoi pensieri, in una sorta di commistione potente di anime. Realmente è pittura che non provoca scontro. La valanga intensa e armonica del colore trasporta forme e spazi proprio come il fuoco muove i nostri volti e li trasfonde nel calore.
Una musica solare questa pittura duomo che risponde al divino, perché sua è terra davi, mai centuplicazione meccanica e sensoriale, ma costruzione della vastità per assimilazione, distacco, conseguimento. Non c'è cuore solo, ma ottica totale che coglie come sacro la massa atomica della terra, proprio per il legame che coniuga lei, come lo sguardo, al suo fuoco o centro. È un regno dei cieli che adombra il campo senza calcolo e in dispendio di totali energie. Luomo si fa palo per essere alto, la testa sfera per ruotare, la bocca scrittura per segnare consapevolezza. Le città archi e porte per entrare. In verità tutto è chiuso e tutto è aperto. Chiuso come nero lantico mistero della luce. Aperto come il dio della luce che provoca attraverso porte le creature a passare. E in vero tutto passa, lì Ahmed ti invita ad entrare...


Francesca Limoli poetessa




Nascere al Sud nella grande luce, calda di sabbia dorata che di rosso e giallo nutre; in notti profonde oltremare, il blu più caldo fra i blu e poi, per evento o scelta, finire a mano a mano più a Nord a raffreddare le origini per quasi congelarle come ricordi e memorie e viverle, porgerle in altri climi ad altra gente perché ne diventi depositaria e cultrice col diritto-dovere culturale di capire e rispettare; ecco il cammino e il fine di Ahmed Ben Dhiab.
Le memorie, i ricordi, si raccontano o si scrivono; per scriverli servono segni organici e convenzionali: la grafia, che diventa calligrafia, quandè bella scrittura, bel segno-forma narrativo.
Calligrafia, alfabeti ben scritti, che Ahmed, per necessità culturale e umana, compenetra con altri alfabeti ed altre scritture, senza confonderli, ma giustamente rispettoso degli uni e degli altri.
Le pagine sulle quali la scrittura si stende divenendo racconto, sono pittura. Forme colorate e organizzate, recuperabili morfologicamente nel quotidiano o nel fantastico, nel ricordo o nel sogno.
Scale che accedono a misteriosi habitat o da questi, scendendole, ci allontanano. Angeli dalle ali nere, custodi o distruttori di città sovrastate da Luna nera che si rispecchia nel suo passato, presente e futuro, in arcani specchi dacqua, improbabili come tali, ma veri come specchi dellanima.
La figura «Crocifisso» ricoperta di segni è la calligrafia che diventa personaggio o viceversa ed è significante del fatto che chiunque può scrivere la propria vita sulla pelle al fine che chiunque la possa leggere.
La porta è la porta sul deserto di luce aurea, impenetrabile perché abbagliante e al di qua i segni di memorie, attuali narrazioni che diventano la chiave per entrare e uscire da questa.
I giardini Celesti-Terrestri scritti e dipinti sono indicazioni e testimonianze del come si è vissuto, si viva e si vorrebbe o dovrebbe vivere.
Leggendo le opere di Ben Dhiab può venire in mente parecchia pittura europea dellOtto-Novecento e fra i pittori quello più evocato potrebbe essere Paul Klee ed è pertinente, ma è altrettanto opportuno considerare che in quelle terre il Maestro di Berna andò per riscaldare la propria luce, vivendo temporaneamente la nuova folgorante, ma Ahmed in questa, quella di Tunisi, ci è nato.


Ugo Sanguineti pittore

 




 

 
 



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